La maladie de Dupuytren est une atteinte de la main et des doigts se traduisant par une rétraction progressive des doigts vers la paume de la main, à même d’engendrer une impotence fonctionnelle conséquente.
La maladie progresse habituellement par poussées et, bien que les récidives soient fréquentes, plusieurs traitements permettent d’obtenir des améliorations significatives sur le long terme.
La prise en charge est habituellement chirurgicale.
La maladie de Dupuytren, qu’est-ce que c’est ?
La maladie de Dupuytren est une affection de la main qui provoque la rétractation des doigts vers la paume de la main, dans différents degrés de sévérité.
Son nom lui vient d’un chirurgien du XIXème siècle, le Baron de Dupuytren, le premier à l’avoir décrit. Toutefois, son nom médical est fibrose rétractile de l’aponévrose palmaire.
Une fibrose est un durcissement des tissus, qui se dénaturent peu à peu et perdent alors leur fonctionnalité et leur élasticité.
L’aponévrose palmaire, quant à elle, est une membrane fibreuse s’étendant sous la paume de la main et les doigts, et enveloppant les muscles et tendons fléchisseurs de la main.
Dans la maladie de Dupuytren, certaines cellules composant les tissus de l’aponévrose, les myofibroblastes, se mettent à proliférer, engendrant une production excessive de collagène, protéine offrant aux tissus leur solidité et rigidité.
Cette prolifération tissulaire rend alors l’aponévrose excessivement dure et rigide, perdant ses qualités d’origine : c’est la fibrose.
La maladie de Dupuytren est le trouble héréditaire des tissus conjonctifs (ou membranes fibreuses) le plus fréquemment rencontré.
Elle n’atteint pas systématiquement le stade critique de la contracture, ou rétractation des doigts, pouvant engendrer une impotence fonctionnelle totale.
Ses causes sont longtemps restées mystérieuses, mais on lui connaît aujourd’hui une origine principale génétique. Il existe également certains facteurs environnementaux favorisants.
La main : siège des symptômes de la maladie de Dupuytren
Les symptômes de la maladie de Dupuytren évoluent lentement, progressivement, par poussées. Ils se limitent exclusivement à la main et aux doigts.
Aux premiers stades de la maladie, les symptômes sont fréquemment indolores et peu marqués. Au fil de son évolution, des nodules apparaissent sous la peau de la paume et évoluent en cordes indurées pouvant devenir douloureuses.
À termes, la contracture survient : les doigts se rétractent, demeurant en flexion vers la paume, et perdant leur capacité d’extension.
Les doigts les plus fréquemment atteints sont l’auriculaire et l’annulaire, mais une diminution de l’espace entre l’index et le pouce est également commune. En l’espèce, tous les doigts de la main peuvent être affectés.
Diagnostic de la maladie de Dupuytren
Le diagnostic de la maladie de Dupuytren passe par un examen clinique et une anamnèse. Le profil du patient est aussi un indicateur, l’affection touchant plus volontiers les hommes de plus de 40 ans.
La palpation de la paume de la main révèle la présence de nodules ou de cordes indurées, évolution de ces nodules, localisés soit de manière isolée au niveau de la paume de la main mais pouvant s’étendre également le long des différents rayons digitaux. La flexion des doigts est également un indice équivoque lorsqu’elle est déjà présente.
Le diagnostic de la maladie de Dupuytren est un diagnostic clinique et donc les examens d’imagerie médicale ne font pas partie des outils de diagnostic couramment utilisés.
Traitement de la maladie de Dupuytren : l’opération de la main
Le traitement de référence de la maladie de Dupuytren est chirurgical. À l’heure actuelle, aucune thérapie médicale n’offre de résultats concluants.
L’intervention chirurgicale privilégiée est une aponévrectomie, soit une exérèse des tissus fibrosés.
L’aponévrectomie peut parfois être réalisée en percutané, c’est-à-dire en pratiquant une ouverture minime dans la peau permettant tout juste de passer une aiguille pour rompre les cordes indurées seulement dans les cas de fibrose localisée au niveau de la paume de la main. Si la fibrose s’étend au doigt, cette technique chirurgicale percutanée est trop dangereuse et risque de compromettre les artères et nerfs des doigts qui sont accolés à la fibrose. La récupération est plus rapide, et l’intervention peu invasive : elle est privilégiée chez les personnes fragiles, notamment les patients âgés et comme décrit précédemment pour les maladies de Dupuytren palmaires isolées (n’atteignant pas les doigts).
L’aponévrectomie chirurgicale doit être réalisée par un chirurgien spécialiste de la main pour réduire les risques de complication.
Pour cause, tout acte chirurgical peut engendrer la formation de tissus cicatriciels susceptibles de se fibroser, une évolution qui serait particulièrement contre-productive dans le cadre du traitement de la maladie de Dupuytren.
Pour minimiser ce type de risques, la dissection des tissus de la main, organe particulièrement complexe, doit être minutieuse et faire appel à un savoir-faire pointu.
Les incisions suivent des tracés précis, et les tissus altérés, qui tendent à s’infiltrer dans tous les interstices entre les différentes composantes de la main, sont ôtés en épargnant au mieux les nerfs, les tendons et les artères afin d’éviter toute séquelle.
L’intervention peut comprendre une greffe de peau, un lambeau cutané et/ou une libération de certains tendons ou articulations en fonction de la gravité de la maladie.
Voici un exemple de résultat post opératoire à 2 jours d’une intervention. La cicatrice est typiquement en Z sur toute la longueur de la fibrose pour permettre la résection optimale des tissus fibrosés et d’éviter au maximum les complications iatrogènes de lésions nerveuses et/ou artérielles.
La chirurgie ne permet pas toujours de retirer la totalité des tissus fibrosés, et, du fait de son caractère génétique, la maladie de Dupuytren tend à récidiver dans plus de la moitié des cas.
Le traitement de la récidive est similaire au traitement initial, mais la chirurgie de tissus déjà opérés est plus délicate et souvent moins efficace. Enfin, la main ne peut habituellement pas être opérée infiniment.
Pour éviter les récidives précoces, les consignes post opératoires doivent être rigoureusement respectées. En effet elles ne sont pas les mêmes en fonction de la gravité de la maladie mais le plus souvent elles comportent des soins de pansements assidus avec une visite de contrôle obligatoire à quinze jours post opératoires avec votre chirurgien de la main, le port d’une attelle d’extension dynamique à porter soit uniquement la nuit soit le jour et la nuit pour une durée qui sera déterminée avec votre chirurgien, ainsi qu’une rééducation post opératoire précoce intensive pour éviter la rétraction itérative.
Maladie de Dupuytren et cancer : existe-t-il un lien ?
Il n’y a pas de lien direct établi entre la maladie de Dupuytren et le cancer. Il n’y a donc pas lieu de s’inquiéter d’un risque augmenté de développer une tumeur maligne pour les personnes atteintes de la maladie de Dupuytren. Par ailleurs, cette maladie ne peut pas se transformer en cancer, contrairement à certaines idées reçues.
La maladie de Dupuytren est une affection bénigne qui concerne les tissus conjonctifs de la main ou du pied, provoquant une rétraction progressive et irréversible des doigts ou des orteils. La voie de Wnt, qui joue un rôle important dans l’embryogenèse et la production des tissus, subit une modification génétique dans la maladie de Dupuytren. Cette même voie de Wnt peut aussi être à l’origine de cancers, mais par des processus différents.
Le cancer est quant à lui une pathologie maligne qui survient à la suite d’une accumulation de mutations génétiques qui confèrent aux cellules la possibilité de se reproduire de façon anarchique et de migrer vers d’autres organes.
Certains facteurs environnementaux tels que le diabète, la consommation de tabac ou d’alcool peuvent cependant augmenter à la fois la probabilité de voir apparaître la maladie de Dupuytren et celle de développer certains types de cancers. Il est toutefois impossible de déterminer de façon formelle si ces facteurs sont à l’origine ou non de l’une de ces maladies.
Dans des cas exceptionnels, il arrive que des métastases cutanées de la main puissent passer pour une maladie de Dupuytren.
Le traitement contre le cancer peut-il favoriser la maladie de Dupuytren ?
Certains patients traités pour leur cancer peuvent être touchés par la maladie de Dupuytren. La survenue de nodules et de cordes de Dupuytren pendant un traitement contre le cancer reste possible. Mais il est très difficile d’établir un lien entre la maladie et ces traitements.
Certaines patientes traitées pour un cancer du sein peuvent bénéficier d’un curage ganglionnaire, avec un impact sur l’œdème et la circulation lymphatique. Ce geste pourrait favoriser la survenue de la maladie de Dupuytren chez les patientes porteuses du gène.
Cependant, les évolutions permanentes des options thérapeutiques anti-cancer et leur nombre en constante augmentation peuvent rendre difficile l’établissement d’un lien de cause à effet.
Ces traitements anti-cancer restant indispensables à la prise en charge des malades, leur utilisation n’est pas remise en cause, peu importe leur incidence sur le caractère évolutif d’une maladie de Dupuytren.
Chirurgien orthopédique membre supérieur
Interne des hôpitaux de Paris en chirurgie orthopédique
Chef de clinique – Hôpital Cochin Paris